Déclaration liminaire de la FSU au CSA départemental du 5 septembre 2024

En ce mois de septembre 2024, les mêmes discours rassurants voire lénifiants se font entendre, ainsi que les marques de reconnaissance de circonstance envers les personnels de l’Education Nationale, mais il faut bien admettre le caractère inédit de cette rentrée : sans Ministre officiellement nommé, sans gouvernement, et avec un tel déni de démocratie. Il devient vertigineux et acrobatique d’initier nos élèves au respect des institutions et des élections, quand le plus haut appareil de l’Etat ne les respecte pas lui-même. Il devient difficile d’incarner l’exemplarité d’agent.es au service de l’Etat et de l’intérêt public, quand on fait le constat que revenir sur la réforme des retraites ou augmenter le SMIC coûte plus au Chef de l’Etat que le respect de la démocratie. Au-delà d’un déni démocratique majeur, cet état de suspension multiplie les incertitudes. Les orientations pour l’école comme pour ses personnels dépendent en effet du nouveau gouvernement, au sein d’une Assemblée sans majorité absolue, mais l’exercice démocratique voulu par le président de la république suite à sa volonté de dissoudre l’Assemblée nationale s’est soldé par un rejet très majoritaire de sa politique. Nous exigeons que la nomination d’un nouveau gouvernement conforme aux résultats exprimés, permette, sur la base d’une réelle négociation avec les organisations syndicales, une orientation politique et des mesures pour l’école conformes aux attentes des Français.

 

La rentrée scolaire constitue un élément important de la vie de la Nation mais également une étape cruciale pour les élèves et les enseignant.es. Elle est portée par une forte émulation professionnelle individuelle et collective. Pour autant, les conditions de travail dégradées, la succession de réformes inadaptées aux enjeux et le manque criant de moyens, en particulier pour une inclusion scolaire de qualité, continuent d’abîmer l’engagement et la détermination des personnels.
Parce que le contexte de rentrée est politiquement inhabituel, la FSU estime qu’il est urgent de peser dès maintenant sur les futures décisions politiques. Face aux enjeux climatiques, sociaux et géopolitiques actuels, il est impératif de donner les moyens de travailler et de redonner sens au métier. A court terme, il faut abandonner certaines réformes en cours comme le “Pacte enseignant” et le “Choc des savoirs” avec l’arrêt immédiat des évaluations standardisées, de l’éclatement du groupe-classe en collège et des mesures de “tri social”. Et pour la FSU, la question du budget de l’éducation doit être au centre de toutes les attentions et dans cet objectif, le Parlement doit voter dès cet automne une loi de finances à la hauteur des enjeux, garantissant un budget suffisant pour les effectifs des classes, les postes de personnels nécessaires et un moratoire sur la carte scolaire, sans nouvelles fermetures de classes l’année prochaine. L’abaissement des effectifs de classe est une mesure prioritaire. Alors qu’ils sont un levier essentiel pour la réussite scolaire, les effectifs d’élèves par classe restent désespérément supérieurs à la moyenne de l’OCDE. La hausse des salaires en est un autre. Alors que la crise du recrutement perdure et s’enracine avec 3185 postes non pourvus aux concours, 1er et 2nd degré confondus, que pas moins de 1301 petites annonces sont parues pour recruter des enseignant.es, que la promesse de “mettre un.e enseignant.e devant chaque classe” devient une énième promesse non tenue à la rentrée, la hausse des salaires des enseignant.es et de tous les personnels de l’Education Nationale devient une nécessité absolue. La FSU s’adressera dans les prochains jours en ce sens à la nouvelle Assemblée Nationale. L’école a toujours fait front pour la République. Il est temps que la République et ses élu·es fassent front pour l’école.

 

Dans le premier degré, impossible de ne pas aborder dans cette déclaration les propos de notre Recteur qui, sans complexe aucun, annonce sur le plateau de France 3 en direct le soir de la rentrée, qu’il n’y a aucune classe à plus de 23 élèves dans toute l’Académie en précisant qu’il représente la parole de l’Etat ! Pour la FSU-SNUipp de l’académie de Toulouse, ces propos mensongers à destination de l’opinion publique sont inacceptables. Nous tenons à rappeler que la dotation académique pour cette rentrée est de ZERO poste, bien loin des besoins pour faire baisser les effectifs dans toutes les classes et pour créer les postes nécessaires à la réussite de tou.te.s nos élèves. D’après nos chiffrages, basés sur les documents de l’administration des CSA-d (phase de janvier et/ou juin), c’est près de 600 écoles dont la moyenne par classe est supérieure à 23 élèves. Bien sûr notre département n’est pas le plus concerné de l’Académie. Mais même dans le Gers, a minima une dizaine de classes est à plus de 23. Autant de postes nécessaires pour que « l’état fasse ce qu’il faut » comme annoncé par Mr le Recteur. C’est pourquoi afin de concrétiser le vœu de Mr le recteur, nous demandons un véritable CHOC des MOYENS (à minima un démenti) !

 

Dans le Second degré, force est de constater que la crise du recrutement perdure en cette rentrée. Dans le département du Gers, dans le second degré, il manque au moins un.e enseignant.e dans un établissement sur deux (14 établissements sur 30). De plus, selon l’analyse de la FSU, la durée moyenne de vacance d’un poste enseignant du second degré s’établit désormais à 28 jours. Les promesses faites par Gabriel Attal n’ont pas été tenues, et, effet du “Choc des savoirs” oblige, il manque particulièrement des enseignant.es de mathématiques et de français. Cela se perçoit dans notre département où, selon nos retours, il manque un.e professeur.e de français au lycée de Pardailhan, à la cité scolaire de Lectoure et au lycée de L’Isle Jourdain et un.e professeur.e de mathématiques au lycée du Garros, au lycée de L’Isle Jourdain, au collège de Mauvezin et au collège de Samatan. Les moyens ne sont pas donnés pour l’inclusion, tous les élèves bénéficiant de notifications ne seront pas accompagnés et il manque un.e enseignant.e en ULIS au collège Louise Michel de L’Isle Jourdain et au collège de Masseube. Concernant les personnels eux-mêmes, la doctrine du Rectorat de Toulouse de ne pas toucher aux affectations des TZR en septembre perturbe le fonctionnement des établissements et va parfois à l’encontre du bon sens dans l’élaboration des services. Ainsi, un BMP de Lettres ne sera-t-il pas pourvu au lycée de L’Isle Jourdain alors qu’une collègue TZR intervient dans l’établissement, mais aussi dans deux autres pour compléter son service. A titre d’exemple, dans un petit collège comme celui de Mauvezin, près d’un tiers des enseignant.es se retrouvent en services partagés, parfois avec des établissements très éloignés.

 

Les conditions d’exercice pèsent chez les personnels, mais aussi les conditions de recrutement : dans les années 80, un.e enseignant.e du Second degré pouvait commencer sa carrière en touchant deux fois le SMIC et la terminer en touchant 3 ou 4 fois le SMIC. Aujourd’hui, les salaires se tassent et les carrières des personnels de l’Education Nationale ne sont plus attrayantes. La promesse de Macron de revaloriser les traitements de toutes et tous à hauteur de 10 % n’a pas été tenue, et la profession a largement rejeté les mesures de pseudo-valorisation que constituaient le Pacte. Ce dernier, lancé en grandes pompes il y a deux ans, est un échec : seulement 24,2 % des enseignant.es l’ont signé alors que l’objectif fixé par Pap NDiaye la première année était de 30 %, avec une montée en puissance les autres années. Force est de constater que ces objectifs n’ont pas été atteints. La FSU dénonce les pressions exercées par les chefs d’établissement du Second degré pour signer le Pacte, elle réclame des mesures de valorisation générales qui permettent à tous les personnels de sortir de cette logique de néo-management et de personnalisation des salaires qui mettent les personnels en concurrence. Considérant qu’il s’agit d’une dépense d’argent public importante, elle exige une plus grande vigilance et vérification des missions effectuées dans le cadre du Pacte.

 

Dans les écoles primaires, le moral des personnels n’en finit plus d’être miné et le découragement augmente. Les nouveaux programmes en français et mathématiques des cycles 1 et 2 ont été élaborés à la va vite par le Conseil Supérieur des Programmes avec une concertation sur le terrain qui a frisé le ridicule. Ils ont été conçus comme des outils de contrôle des pratiques et portent une vision mécaniste, simpliste voire dangereuse pour les apprentissages des élèves.Ces programmes induisent un changement profond du sens des apprentissages en maternelle dont l’objectif premier n’est plus de “devenir élève” mais de préparer à l’acquisition des savoirs fondamentaux. En cycle 2, les protocoles et les objectifs chiffrés explosent. Les séquences minutées donnent des cadences d’apprentissages fixées arbitrairement et basées sur un élève type normé. La pression des résultats est mise sur le dos des enseignant.es. C’est plus facile que de reconnaître le manque de moyens alloués à l’Education nationale.

En collège, force est de constater que le “Choc des savoirs” n’est pas celui que Gabriel Attal souhaitait : les « groupes de niveaux » ou la réforme du brevet tels que le 1er Ministre démissionnaire les concevait ne vont pas se mettre en place, d’une part parce que la profession s’est mobilisée, et d’autre part parce que nous avons gagné la bataille de l’opinion publique. Les parents d’élèves se sont mobilisés, les collègues se sont alliés avec eux et se sont emparés des Conseils d’Administration pour faire des groupes qui ne sont pas des groupes de niveaux et demeurent hétérogènes. Il reste à exiger des programmes qui soient émancipateurs pour toutes et tous, basés sur de réels apprentissages, et non des compétences “psycho-sociales” que l’on entend normer à travers l’uniforme ou des dispositifs “d’éducation à” … Dans le “Choc des savoirs” tel que le concevait Gabriel Attal, les savoirs dits ”fondamentaux” prenaient trop d’importance au détriment d’autres disciplines, et nous voyons d’un bon œil le fait que toutes les disciplines soient prises en compte dans le contrôle continu pour l’obtention du Brevet. Nous resterons vigilants sur le fait que le Brevet ne devienne pas un examen de passage et une mesure de “tri social” pour barrer la route du lycée à certains élèves.

En lycée, après la remise en cause d’un BAC national engendré par les réformes Blanquer, la FSU exige qu’un bilan contradictoire de ces réformes soit établi, pour un lycée plus démocratisant, et l’abandon de réformes visant à trier les élèves pour le post-bac. Nos collègues enseignant en Terminale ont aussi été nombreux à témoigner de la lourdeur des programmes, en particulier en SES. Si le report des épreuves d’Enseignements de spécialité au mois de juin était une mesure conforme à notre demande, les élèves ont à faire maintenant à un cumul de tâches trop important, avec les épreuves de spécialité, le Grand Oral et l’épreuve finale de philosophie. La FSU exige donc un allègement des programmes, en accord avec les associations disciplinaires. Si les programmes doivent être ambitieux, ils doivent aussi mener tous les élèves vers les mêmes ambitions et ne pas les “trier”.

La FSU continuera de se mobiliser pour une école publique de qualité, inclusive et équitable, où chaque élève, chaque enseignant·e, chaque personnel peut trouver les conditions nécessaires à la réussite et à l’épanouissement. Il en va de l’avenir de notre société et de la confiance que nous plaçons dans les valeurs républicaines que l’école publique se doit de transmettre.