A l’heure où l’on nous demande de mettre en place des cours d’”empathie”, il est fort dommageable que certain-es élu-es de la Nation aient un comportement que l’on qualifiera a minima de “méprisant” envers les organisations syndicales représentatives des personnels enseignants. Le 20 septembre, invitées par la commission culture de l’Assemblée Nationale sur la question de la rentrée scolaire, leur constat était assez unanime sur le sujet, d’une rentrée sans moyen avec des effets d’annonces ne permettant pas à l’Ecole et ses personnels de faire leur travail dans de bonnes conditions.

Visiblement, cette réalité a dérangé les député·es Renaissance et Rassemblement national qui, ont multiplié les propos dénigrants, méprisants, voire insultants. Entre la remise en cause de la représentativité des organisations syndicales, pointant au passage le « ton caricatural », la comparaison de leur expression à “un sketch des Inconnus” et à “des islamo-gauchistes”, en passant par la qualification des propos de certain·es représentant·es syndicaux de « ridicules et totalement déplacés », les enjoignant à « se mettre au niveau », « à baisser d’un ton » et menaçant de ne pas les inviter l’an prochain, c’est à une violence inacceptable à laquelle ont été confronté nos représentant-es. Ceci ne va pas sans nous inquiéter pour l’avenir…

Il n’y a que la vérité qui blesse pourra-t’on conclure car les problèmes rencontrés en cette rentrée sont réels : crise du recrutement, salaires, conditions de travail, inclusion, situation des AESH.

Sur le terrain, ce sont bien le manque d’enseignantes et d’enseignants, le nombre insuffisant de personnels remplaçants, les difficultés de recrutement et le manque d’attractivité du métier dans le premier degré comme dans le second qui sont notre quotidien. Les effets délétères du Pacte, tout comme la perte de sens du métier alors que les conditions de travail sont de plus en plus dégradées en rajoutent encore.

Face à cette réalité, la communication gouvernementale a été de faire diversion avec des sujets qui, même s’ils sont importants, n’ont jamais été traités avec sérieux par l’institution et qui auraient pu faire l’objet de mesures ultérieures : le port de l’abaya, le harcèlement scolaire (dont on renvoie encore aux enseignan-tes leur manque de vigilance), planter des arbres avant la sainte Catherine pour les élèves de 6ème et, le dernier avatar, des cours d’empathie, dont on a montré la difficulté de les mettre en place, surtout sans formation préalable et avec une administration elle-même très peu empathique avec ses personnels.

Rentrée scolaire :

La réalité de cette rentrée scolaire, au niveau national, c’est 1 117 emplois supprimés au budget, le premier degré a renoué avec une austérité que l’école n’avait pas connue depuis 2012. Les besoins réels de l’Ecole pour réduire les inégalités scolaires ne sont pas pris en compte alors que la baisse de la démographie scolaire aurait pu permettre de conserver ces moyens pour améliorer les conditions de scolarisation des élèves et de travail des personnels. Dans ces conditions, à cette rentrée, plus aucune marge de manœuvre ne peut être dégagée pour ouvrir des classes là où les besoins sont les plus marqués, si ce n’est en fermant d’autres classes… Le Gers n’échappe pas à cette logique comptable: 18 postes vacants le 1er septembre. Mais comme il faut bien assurer la tenue de la promesse présidentielle, 6 postes sont pourvus par des personnels contractuels, 4 remplaçant-es sont déjà en place sur des postes spécialisés toujours vacants. Il reste tout de même 8 postes pour lesquels il n’y aura pas de recrutements (7 postes de remplaçant-es et 1 poste de RASED). On peut légitimement s’interroger sur ce qui va se passer quand il y aura des enseignant.es malades…

Les directeurs et directrices sont malmenées. Avec la mise en œuvre des décrets de la loi Rilhac, ils et elles se voient attribuer une « autorité » non souhaitée, dont les contours restent très flous. Les réunions se multiplient, ils et elles sont sollicité-es pour le pacte, pour l’école du futur…, Pour la FSU , il est indispensable de ne pas isoler les directrices et directeurs et de conforter les collectifs de travail et nous y veillerons. Les collègues en général sont malmenés quand ils doivent faire fonctionner une école inclusive sans moyens, manque de RASED, d’AESH, d’accès aux CAMSP, CMMP. Externalisation et médicalisation de la difficulté scolaire sont le lot de nos écoles gersoises, renforçant ainsi les inégalités. Il est urgent de donner les moyens à l’Ecole inclusive de fonctionner.

Le budget 2024 ne le permettra pas avec 2193 suppressions de postes enseignants dans le public qui sont annoncées dont 1709 pour le premier degré.

Dans le second degré, la rentrée s’est effectuée à coups d’annonces médiatiques qui, bien loin de répondre aux besoins réels des collèges et des lycées, semblent s’adresser bien plus à une opinion publique réputée critique envers les enseignant.es et agent.es qui composent l’Education Nationale. Au manque supposé d’autorité de l’Ecole, le gouvernement répond par le Service National Universel, montrant par là une vision de l’Ecole étriquée et passéiste vouée à la « bonne parole républicaine », à la main d’un pouvoir politique prescriptif. Au constat partagé de salaires des enseignant.es inférieurs à la moyenne européenne et au bas de l’échelle dans l’OCDE, le gouvernement réactive le fameux “travailler plus pour gagner plus”, et ce, alors même que les enquêtes menées par l’Education Nationale elle-même avaient prouvé que les enseignant.es travaillaient plus de 42 heures par semaine. Face à la crise du recrutement, au manque d’enseignant.es sur le terrain, le Ministère de l’Education Nationale recrute de plus en plus de contractuel.les – ceci n’est pas nouveau – et fait reposer sur les enseignant.es titulaires la responsabilité des “heures perdues” par les élèves. L’instauration du “Pacte” dans les collèges et les lycées crée un climat délétère pour les équipes pédagogiques comme pour les chefs d’établissement, forcés de mettre en oeuvre des “protocoles de remplacement”, au détriment des projets pédagogiques, voyages, sorties, formations qui cimentaient les équipes et les établissements. Le gouvernement prétend résoudre le problème du remplacement de courte durée (moins de 15 jours) sur le dos des enseignantes et des enseignants → en renvoyant la responsabilité aux enseignantes et enseignants alors qu’il est incapable d’assurer les remplacements longs. Mais les usagers de l’Education Nationale, les élèves et les familles ne sont pas dupes, quand cela fait des mois qu’une absence prévue n’est pas palliée, quand, comme c’est le cas dans plusieurs établissements du second degré du Gers, il manque des professeurs de français depuis le début de l’année …

Si nous nous réjouissons des ouvertures de classes qui ont été faites en fin d’année scolaire dans le Second degré dans le Gers, en réponse à des situations que nous avions signalées, nous souhaiterions que la préparation de la rentrée se déroule de manière plus sereine, de manière à pérenniser les postes, et à ne pas déstabiliser les équipes d’une année à l’autre en fonction de variations d’effectifs qui se produisent immanquablement chaque année. Pour cela, l’ouverture des classes à partir de seuils à 36 élèves en lycée et à 31 élèves en collège doit être abandonnée. La réforme Blanquer, qui met fin aux filières au profit d’enseignements de spécialité précarise les enseignants qui peuvent voir leurs services partagés au gré des choix des élèves de seconde et donc du nombre de groupes de spécialité dans l’établissement. Elle contribue à mettre en concurrence les matières pour attirer les élèves et conserver les postes.

Enfin, pour la FSU, le changement climatique, avec des épisodes caniculaires de plus en plus fréquents, doit obliger à repenser les locaux scolaires pour préserver la santé des élèves et des personnels, et leur permettre d’apprendre et de travailler dans de bonnes conditions.

Les écoles et établissements doivent être exemplaires en matière d’objectifs de neutralité carbone et d’adaptation au changement climatique. Cela implique la mise en place d’une instance indépendante en charge du contrôle et de l’évaluation du bâti, mais aussi la garantie de financements à destination des collectivités pour l’exécution des travaux de rénovation nécessaires ou de nouvelles constructions. Un cadrage national et un plan d’aide aux collectivités garantissant les financements qui passe forcément par une péréquation doit être mis en place d’urgence par l’État pour que l’investissement soit à la hauteur des enjeux

Car n’oublions pas aussi que la rénovation du bâti scolaire est un enjeu de réduction des inégalités qu’elles soient territoriales et/ou scolaires. La conception des bâtiments scolaires est une des problématiques pour améliorer les apprentissages. Une Ecole écologique doit répondre à des enjeux complexes : allier le respect de l’environnement et la santé des personnels, élèves, usagers et usagères, dans un contexte de travail et d’étude. Mais Il y a maintenant urgence à transformer notre Ecole.

Pour finir, là où nous aurions besoin de plus de démocratie, de mesures pour pallier le manque de mixité sociale dans le service public, d’un investissement massif dans le recrutement de futur.es enseignant.es, le gouvernement manque l’Histoire en ne s’en tenant qu’au dogme budgétaire. En ne prenant pas la mesure de ce qui se joue, le gouvernement prend le risque d’une colère grandissante de la profession, voire d’un conflit, ou d’une forme de désarroi qui acterait une rupture profonde avec l’institution. Pour toutes ces raisons, la FSU sera mobilisée, demain, vendredi 13 octobre, pour les salaires, les services publics, l’égalité femmes / hommes et l’écologie.