Déclaration liminaire de la FSU

FS SSCT sD du 4 avril 2024

 

Ces dernières années, ces derniers mois, les ministres, les annonces, les chantiers se succèdent, de manière incessante, au mépris des personnels, et sans prise en compte du calendrier de l’Éducation nationale.  Rien  n’est fait pour  améliorer  la  situation  des personnels. Bien au contraire, on enchaîne et empile des réformes qui dégradent encore les conditions de travail des personnels et vont affaiblir le service public d’éducation. Aucun travail d’évaluation de ce qui a été fait, de l’impact des futures réformes (de toute façon le calendrier ne le permet pas !). 

  • Aucun bilan n’a été fait de l’impact de la réforme des lycées sur la santé, la sécurité et les conditions de travail. Il serait temps ! Et les indicateurs ne manquent pas : indicateurs chiffrés sur le maintien ou la perte des dédoublements disciplinaires, respect des vœux des collègues en matière d’emplois du temps (respect des préconisations médicales ou handicap, demi-journées libérées, amplitude des journées…), organisation pédagogique de l’année avec le grand oral, charge de travail…
  • Les effets sur la santé des personnels de la réforme de la voie professionnelle doivent également être pris en compte. Cette réforme se met en place, contre les personnels, toujours sans aucune anticipation sur ses impacts sur la santé et les conditions de travail et d’emploi. 
  • Aucun travail non plus de prévention dans la mise en place du Pacte et de ses conséquences prévisibles sur les personnels, sur l’égalité femme/homme… La réponse faite selon laquelle ces pactes et HSA au dessus des 2 heures imposées seraient librement choisies par les personnels n’est pas satisfaisante dans la mesure où ces choix sont souvent contraints par les faibles rémunérations, par les pressions diverses qui s’exercent sur les personnels, par la conscience professionnelle des enseignant·e·s. L’employeur doit protéger ses salariés du surtravail et des risques de burn-out qu’il peut engendrer, surtout quand il n’est pas capable de les remplacer quand ils sont en arrêt maladie.

 Nous ne nous étendrons pas dans cette instance sur les dimensions catastrophiques pour les jeunes du prétendu « choc des savoirs » qui vise à en finir résolument avec l’ambition d’un collège démocratique pour toutes et pour tous pour lui substituer un collège du tri et de la ségrégation scolaire et sociale. Nous relèverons simplement les impacts sur la santé, la sécurité et les conditions de travail des personnels :

  • le contrôle renforcé du travail enseignant et la négation de sa professionnalité via des évaluations standardisées, le recours à des intelligences artificielles ou la labellisation des manuels,
  • l’alourdissement programmé de la charge de travail des personnels avec la mise en place des groupes de niveaux en français et en mathématiques accompagné d’une refonte accélérée des programmes de tout le second degré,
  • la déqualification des nouvelles et nouveaux professeur·es par le renoncement à une formation de haut niveau pour mieux formater les nouvelles recrues à un métier toujours plus prescrit,
  • le mépris affiché pour les disciplines ne rentrant pas dans les quatre piliers restrictifs si ce n’est inquiétants du nouveau socle annoncé, avec des incertitudes croissantes pesant sur les enseignements artistiques,
  • le recours massif aux heures supplémentaires et aux contractuel.les pour mettre en place ladite réforme, rendant pour les personnels de direction, avec les contraintes liées à la multiplication des cours en barrette, la tâche de la préparation de la rentrée des plus acrobatiques tout en faisant peser de lourdes menaces sur les emplois du temps des élèves comme des personnels.
  • Les professeur·es de mathématiques et de français seront confronté·es à de  nombreuses difficultés qui touchent au sens du métier : comment être professeur∙e principal∙e d’une classe ? A quels conseils de classe assister ? A la rentrée 2025, ils et elles devront enseigner dans tous les niveaux du collège afin d’assurer les  alignements de classes. Une progression commune s’impose mais comment sauront-ils en juin à quel type de regroupement ils devront enseigner l’année suivante? Et comment progresser au même rythme quand chaque regroupement nécessitera une approche différente sur chaque niveau d’enseignement. Sans parler de celles et ceux qui travaillent dans plusieurs établissements. Cette réforme promet une nette dégradation des conditions de travail des professeur∙es travaillant en  collège, identique à ce qu’ont connu les collègues de lycée, et pour lesquels aucune évaluation n’a été faite.  

Toutes ces mesures, loin d’enrayer la crise des recrutements, patente dans l’Éducation nationale, ne peuvent que l’aggraver. L’ensemble de la profession exprime des grandes inquiétudes, une perplexité sans précédent et un rejet important de ces annonces. Outre la forte mobilisation des collègues, comme nous l’avons constaté lors de la grève du 1er février, il est à remarquer que les expressions publiques d’organisations professionnelles de personnels de direction ou d’inspection, d’ordinaire rares et peu virulentes à l’égard de leur tutelle, traduisent aujourd’hui le caractère massif de ce rejet.

Le manque criant de moyens dédiés à l’école inclusive est depuis plusieurs années, à l’origine des difficultés, qui pèsent au quotidien sur l’ensemble des personnels d’éducation. Il est source de souffrance au travail et dégrade fortement les conditions de travail. Le registre de santé et de sécurité au travail en témoigne, puisqu’un nombre croissant de situations problématiques sont signalées par des enseignant.es épuisé.es. Les signalements du registre de santé et de sécurité au travail sont parlants : 89% des signalements sont des RPS et parmi eux, 78% peuvent être classés dans les risques psycho sociaux des exigences émotionnelles liées à la gestion des élèves difficiles, souvent eux-mêmes en souffrance. Dans tous les cas, cela se passe dans des écoles. qui déplorent par exemple un manque d’AESH en dépit des notifications MDPH et qui dénoncent plus généralement l’absence de moyens, dont une réelle formation pour l’accueil et l’accompagnement des élèves à besoins éducatifs particuliers. Les personnels concernés se sentent en danger mais craignent également pour la sécurité des autres élèves et de l’enfant lui-même. Ils se retrouvent dans l’incapacité de fait, de s’occuper des autres élèves. Ces conditions sont d’autant plus préoccupantes qu’elles ne leur permettent plus d’accomplir leur mission d’enseignement, tandis que certains comportements (menaces, gestes violents, etc.) entraînent une souffrance au travail et sont susceptibles d’impacter leur santé physique ou mentale. L’éducation nationale n’apporte aucune solution adaptée à ces situations explosives, pourtant l’article L4121-1 du code du travail précise que l’employeur « prend les mesures nécessaires pour assurer la sécurité et protéger la santé physique et mentale des travailleurs. » 

Les personnels dénoncent massivement les mauvaises conditions de travail liées à l’inclusion. Le sur-effectif, l’absence de formations, le manque d’AESH ne leur permettent pas d’exercer leur métier dans de bonnes conditions. Ils et elles souffrent et perdent le sens de leur métier. Une inclusion qui ne se passe pas bien constitue un risque psycho-social important. Il peut conduire un∙e agent∙e au mieux à être placé en arrêt par son médecin, ce qui accentue les problèmes de non-remplacement.

Enfin, considérant la situation dégradée dans laquelle se trouvent les personnels du collège Belleforest de Samatan, la FSU regrette le déplacement de la visite en raison de la date tardive de la médiation, qui ne se tient que ce 4 avril. Rien n’empêchait alors la visite des représentant.es des personnels élu.es à la FS SSCT. 

Plus qu’un choc des savoirs, c’est un choc des moyens dont l’éducation nationale a besoin ;  il faut que l’Etat prenne à bras le corps le problème de l’inclusion des élèves en situation de handicap, pour qu’il améliore les conditions de travail des personnels comme des élèves en réduisant le nombre d’élèves par classe, en améliorant l’encadrement avec des infirmiers et infirmières scolaires, des psychologues, des orthophonistes. Il faut de l’humain et jamais les ordinateurs et les logiciels ne feront ce travail. Pour la FSU, investir dans l’école, c’est investir dans l’avenir, ce n’est pas une dépense de fonctionnement qu’il faudrait raboter. Il serait temps que nos gouvernants le comprennent.