Ce comité départemental de l’Education Nationale se tient dans un contexte politique et social inédit lié à la mobilisation contre la réforme des retraites. Les manifestations de la dernière journée du 23 mars ont été d’une ampleur historique, en réponse au déni de démocratie d’Emmanuel Macron, qui entend toujours imposer une réforme des retraites injuste, brutale et injustifiée. Dans le département, ce sont des milliers de salarié.es, jeunes, retraité.es qui ont exprimé avec force et dignité leur refus d’un recul de l’âge légal à 64 ans et d’une accélération de l’augmentation du nombre de trimestres de cotisation requis pour une retraite à taux plein : à Auch, nous étions encore plus de 8 000 après plus deux mois de mobilisation ! La grève, majoritaire dans les collèges et les lycées, a permis la multiplication des actions, menées avec le soutien d’une large partie de nos concitoyens : 90% des salariés et 75% des Français sont opposés à la réforme qu’Emmanuel Macron et sa première Ministre, tentent d’imposer par la multiplication des passages en force lors des débats du Parlement, refusant son vote sur le projet de loi et recourant in extremis au 49.3 par peur de le voir lui refuser son accord à la réforme.

Les enseignant.e.s qui partent déjà à 62 ans et 10 mois en moyenne, ne conçoivent pas la possibilité d’augmenter encore de deux ans leur départ à la retraite. 25 % des enseignant.e.s disent souffrir de troubles musculo-squelettiques et l’exposition aux risques psycho sociaux est beaucoup plus sensible qu’ailleurs : les réformes successives fragilisent nos statuts, diminuent les heures d’enseignements, ce qui nous oblige de plus en plus à partager notre emploi du temps sur plusieurs établissements, avec la fatigue et le risque routier que cela engendre. Le manque de moyens met les enseignant.es devant des classes de plus en plus chargées et hétérogènes, sans effectifs réduits, alors qu’on leur demande de prendre en compte les élèves dans leur individualité, de ne laisser aucun élève au bord du chemin. L’autonomie croissante des établissements, loin d’être une liberté, est un outil de management qui met les professeur.e.s en concurrence, organise une précarité dans le travail, multiplie les injonctions arbitraires. Il faut être un personnel flexible c’est-à-dire corvéable à merci, capable d’enseigner n’importe quelle discipline ou « parcours », capable de pouvoir remplacer à tout moment des collègues, d’être dans des projets qui réclament beaucoup d’investissement non rémunéré pour une reconnaissance de l’administration quasi nulle. Comment, dans de telles conditions de travail, vouloir effectuer deux ans supplémentaires ? Dans l’Education nationale comme ailleurs, il convenait d’améliorer nettement les conditions de travail avant d’envisager une réforme des retraites. Les salarié.es sont aussi révolté.es par la façon dont le gouvernement a voulu rapidement bâcler le débat démocratique : inscrire la réforme des retraites dans un projet de loi de financement de la Sécurité sociale avec l’article 47.1 est déjà une duperie institutionnelle. Cet article, ajouté en 1996, avait pour but de voter le budget avant le 31 décembre. Où était l’urgence au mois de janvier ? Ajoutons à cela le passage en force avec l’article 49,3 assorti d’une menace de dissolution de l’Assemblée Nationale pour faire peur aux député.es hésitant.es et on peut donc affirmer ici que cette réforme n’a pas été votée par la représentation nationale. Dans les autres pays européens, puisque le Ministère aime faire des comparaisons, les lois ont été discutées pendant plusieurs mois voire plusieurs années et les négociations ont pu durer dix ans ! Oui, M. Macron, la démocratie, cela prend du temps mais c’est indispensable pour dégager des consensus.

Dans ces conditions, la FSU réclame que le retrait de la Réforme des retraites immédiat et sans condition.

Le SNES, avec la FSU, n’oublie pas que l’Education et ses personnels, notamment du Second degré, sont les prochaines cibles du gouvernement, et E. Macron ne l’a pas caché dans sa dernière intervention. Alors que les salaires des enseignant.es français.es sont parmi les plus bas d’Europe, pour des classes parmi les plus chargées et des horaires annuels les plus importants, alors que l’inflation lamine leur pouvoir d’achat ainsi que celui de tous et toutes les salarié.es qui n’ont pas la chance de voir leurs revenus indexés sur les cours de la Bourse, alors que ce salaire insuffisant au regard des années d’étude et des conditions de travail dégradées décourage les jeunes à vouloir faire ce métier, l’instauration d’un Pacte de carrière est une provocation pour la profession. A l’initiative de la FSU, l’ensemble des organisations syndicales a quitté les négociations sur le Pacte. L’objectif du Pacte est en effet le développement d’une contractualisation systématisée entre les agent.es et leur hiérarchie. Il s’agirait de permettre à des enseignant.es « volontaires » de signer un pacte d’engagement à faire un volume d’heures supplémentaires au cours de l’année pour faire des projets pédagogiques mais aussi des remplacements, des heures de « devoirs faits », des missions diverses au sein de l’établissement. La revalorisation salariale est donc conditionnée au fait de travailler encore et toujours plus. En raison d’une enveloppe budgétaire trop réduite, ce pacte managérial cache en réalité le refus du Ministère d’augmenter les salaires de toute la profession de façon inconditionnelle, et d’investir, contrairement à ce qu’il prétend, dans l’Education.

Les chiffres de la rentrée 2023 l’attestent : les moyens seront encore insuffisants pour permettre une amélioration des conditions de travail des enseignant.es et des élèves. Avec 667 postes en moins dans le premier degré, 481 dans le second degré, c’est au total 1148 postes qui seront supprimés. Dans le Gers, dans le second degré l’équivalent de 11 emplois temps plein sont supprimés à la rentrée prochaine. Mais encore, cinq enseignants.e.s devront demander une mutation car leur poste est supprimé, sans savoir où ils et elles seront l’année prochaine. D’autres verront leur service partagé. Avec toujours des classes chargées en collège et en lycée.

Alors que nous assistons à une détérioration des conditions d’enseignement et d’éducation, cela n’empêche pas l’Education Nationale d’investir dans des projets aux teintes militaires au coût faramineux tels que le Service National Universel. Là où la scolarisation d’un·e élève coûte 8 900 €, le SNU en coûterait environ 4000 pour 12 jours. Avec deux milliards de budget, pris sur celui de l’Education Nationale, ce sont 28 000 personnels de l’Education Nationale supplémentaires qui pourraient être recruté·es ! Nous dénonçons l’obligation à venir du Service National universel. Le Ministère prévoit en effet une obligation pour les jeunes de seconde et de première CAP dans un premier temps dans 6 départements « pilotes » puis sur tout le territoire les années suivantes. Là où des générations ont besoin des temps de cohésion et de sociabilité en classe, à l’endroit où la citoyenneté se forme, ce séjour de cohésion, d’une durée de 12 jours, prendra encore sur les heures d’enseignement en classe de seconde et de CAP. Loin de notre œuvre éducative et émancipatrice, nous rejetons le caractère militaire imposé du séjour de cohésion se traduisant notamment par des rites et activités directement inspirés de l’univers guerrier tels que le port de l’uniforme, les levers de drapeau, le chant journalier de la Marseillaise, les parcours du/de la combattant·e, les repas à base de rations militaires, les « compagnies » et leur « capitaine de compagnie »… L’engagement des jeunes, qu’il soit associatif, syndical ou militaire, doit rester de l’ordre du libre-arbitre, fondé sur la possibilité de décider, de délibérer mais aussi de refuser.

Enfin, nous dénonçons la décision brutale et improvisée, à nouveau par voie de presse, de la suppression de la technologie en classe de 6ème. Celle-ci répond à une logique comptable de ressources humaines et non à la réalité des besoins de formation des adultes de demain aux nouvelles technologies. Dans le département ce sont pas moins de soixante-dix heures de Technologie qui disparaîtront à la rentrée prochaine. S’il est si difficile de recruter des enseignant·es de technologie, il faut revoir l’attractivité du métier en augmentant les salaires et en considérant les enseignant·es comme des êtres humains et non comme des pions déplaçables de service en service selon le bon vouloir de l’administration. La violence de cette décision montre, s’il en était encore besoin, le mépris du ministère pour ses enseignant·es qui se retrouvent pour beaucoup dans des situations très difficiles.
Il faut arrêter la diminution de la dépense intérieure pour l’éducation qui passe de 7,7 % du PIB en 1995 à 6,5 % en 2020. La FSU a d’autres ambitions pour l’école et l’éducation de notre jeunesse.